La-Cave-aux-Mots

La-Cave-aux-Mots

Paul GRIFFIN - Ne t'en va pas


Paul Griffin vit à New York, où il écrit des livres et élève des chiens. Au Etats-Unis, il est détenteur de nombreux prix littéraires. « Ne t’en va pas », élu meilleur roman « Young Adult » 2011, est traduit cette année chez les éditions La Martinière jeunesse.

Rien ne destinait Mack et Céce à tomber amoureux. Lui, du haut de ses dix-sept ans, est un écorché-vif. Elevé par un père alcoolique, abandonné par une mère battue, il a laissé tomber l’école et évolue en marge de la société. Il est sujet à de régulières crises de violence incontrôlables qui lui ont valu de gros ennuis. Pour prétendre s’en sortir, il n’a que son don : une étonnante faculté à dresser les chiens maltraités. Céce, quant à elle, est plutôt bonne élève. La tête sur les épaules. Intelligente et belle. Bien que son père ait quitté la maison il y a déjà longtemps, elle vit entre son grand frère, Tony, véritable modèle, et sa mère, Carmellia, un peu délurée et portée sur la boisson, mais source quotidienne de tendresse et de compréhension. Mack et Céce : deux existences éloignées… Le mettre d’œuvre de leur rencontre ? Il s’agit de Vico. Un vieil homme au grand cœur, propriétaire d’un restaurant au sein duquel travaille tout ce petit monde. Dès le premier regard, Mack et Céce tombent sous le charme l’un de l’autre. Sur les incitations de Tony, son grand frère aussi clairvoyant que bienveillant, Céce commence à fréquenter Mack. Pour eux, c’est le début d’une romance qui va rapidement tourner au grand amour. Au contact l’un de l’autre, ils se complètent : Céce gagne en assurance tandis que Mack parvient à canaliser son agressivité. Première sortie. Premier baiser. Première nuit… Au fil des jours, le bonheur se dévoile et les deux adolescents, désormais inséparables, commencent à envisager leur avenir ensemble… Mais parfois, le passé vous rattrape sans prévenir. Et malgré la force de leurs sentiments, Céce et Mack vont devoir affronter la brutalité d’une séparation à laquelle leur histoire ne survivra peut-être pas…

A travers un roman à deux voix (celles de Mack et Céce), l’auteur américain, qui n’en est pas à son coup d’essai, signe une romance qui s’illustre par la sobriété de son ton, la crédibilité de ses personnages, et le réalisme du cadre dans lequel se déroule l’action. Ici, en effet, pas d’histoire d’amour de jeunes adolescents modèles et friqués issus de la bourgeoisie. Mack et Céce appartiennent à la classe américaine populaire, à l’avant-dernier échelon de la société. Famille monoparentale, père ou mère portés sur la boisson : leur existence n’a rien d’un conte de fée, et leur horizon ne s’ouvre pas vraiment sur de douces espérances. Tous deux travaillent au restaurant de Vico par nécessité, pour pouvoir simplement vivre. Car la vie ne leur fait aucun cadeau. Céce, pour s’en sortir, peut compter sur son frère, Tony, un modèle de générosité et de probité, mais aussi sur Marcy, sa meilleure amie, un peu légère, mais toujours là en cas de coups durs. Mack, lui, n’a que l’amour qu’il porte à ses chiens. Solitaire et introverti, il les comprend mieux qu’il ne comprend les hommes : comme eux, il a été laissé sur le bord de la route, comme eux, il n’a pas été épargné par la brutalité humaine, et comme eux, il gronde, mais à l’intérieur... Si la première moitié du roman se conjugue au gré d’une douce romance qui installe un amour durable entre les deux adolescents, le tout décrit avec authenticité, la seconde partie prend une tournure plus âpre. En effet, le tragique du destin s’abat sur certains personnages, précipitant leur entourage dans les affres du désarroi. Difficile d’en dire davantage sans dévoiler les fils du roman… On évolue ici bien loin des mièvreries aseptiques et formatées que l’on peut rencontrer au détour de l’étiquette « Young adult ». Car « Ne t’en va pas » colle au réel comme une tache de sang : il en cultive la dureté et le côté parfois implacable en faisant se confronter l’idéal de la passion à l’amour impossible. Au-delà de la simple romance, il présente des trajectoires erratiques, des tranches de vie cahotées par l’impondérable, par ce qui nous échappe. Car dans la vie, on ne fait pas toujours ce qu’on veut…

Bien loin de la légèreté et des ficelles faciles ayant souvent cours dans ce type de littérature, Paul Griffin nous offre, avec « Ne t’en va pas », la rencontre improbable de deux adolescents errants chahutés pas la vie. A travers leurs portraits, il signe une romance douloureusement ancrée dans le réel, à la fois juste et émouvante. Une seule certitude : il ne laissera aucun lecteur indifférent…



25/05/2013
0 Poster un commentaire
Ces blogs de Littérature & Poésie pourraient vous intéresser

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 5 autres membres